samedi 29 décembre 2007

Ecce Bestia, par Guillaume Landemaine et François Tonniac

Guillaume Landemaine
Tu sais que les euphémismes ont remplacés les métaphores ?
Oui, tu peux m'insulter, me maudire, me traiter d'intello
Me reprocher mon âcreté lucide et mon insolence
Mais aucune suffisance ne m'anime tu sais
Je te donnerai tout ce que tu désires, ce dont tu rêves
Si je pouvais, de ma modeste humanité que tu refuses
Si tu connaissais, comme moi l'ivresse des doutes
Ce sable de certitudes sans cesse renouvelées
Ce vacillement de marais, cette perdition aquatique
L'indéfinissable monde, l'étrange réalité
Certes je sais que tu erres en ton angoisse
Tu consommes, tu te damnes pour y remédier
Ton système te vide de ce que tu es
Tu ne rêves plus que par procuration
Une fois arrêté le principe de tes renonciations
De la vente à vil prix de ton individualité
Attends, loin de moi la volonté de te donner leçon
Tu es seul et libre si tu le veux !
Sais-tu que les poètes ne voient que l'invisible
Et tant pis s'ils l'inventent ton indicible
La vie est plus dure pour eux, intraitable
Tu ne crois plus à leur altruisme, c'est logique
Ton narcissisme t'aveugle mais réfléchis et accepte
Pourquoi aurais-tu raison contre le monde ?
Et moi le tort de t'aimer alors que tu me détestes
Même si parfois je doute et m'éloigne
Je te suis dévoué,coeur et âme, ton garde-fou.
Ta parole et ton silence confondus en un doute.
François Tonniac

vendredi 28 décembre 2007

Guillaume Landemaine par François Tonniac

La peinture de Guillaume Landemaine n’est jamais convenue, elle froisse, elle déconcerte, fait grincer les dents de ceux qui ne cherchent plus ni la modernité, ni de raison d’espérer et attendent les couleurs du désenchantement, les teintes de la routine ou pire, l’éternel mélange des gloses auto-satisfaites : le marron des laborieux commentaires ou la nausée verdâtre de la culture convenue des institutions petites-bourgeoises . Non, avec lui la couleur est donnée comme un cri, autrefois un poète a peint les voyelles dans une révolte salutaire . Depuis, Landemaine a articulé avec la même révolte ces couleurs-là en langage d’abord, en philosophie ensuite . Aussi personne ne sera étonné de voir figurer au centre de son exposition des Vanités qui crient à ceux qui ne sont pas dupes, l’hallucinante liberté intérieure, la grande liberté de différence, malgré l’uniformité qui règne aujourd’hui avec le gris des existences monotones . Landemaine est de ceux qui croient à la Vanité de l’homme sans Dieu et il l’exploite avec humilité et opiniâtreté, il torture sa palette pour voir la vie en couleurs, là est l’interrogation jamais le vide, là est l’angoisse jamais le renoncement, là est le secret qui laisse croire au mystère sans être mystique . Vous y verrez représentés aussi les livres parce qu'il risque l’aventure : Cendrars bleu, Apollinaire jaune, Baudelaire rouge, là se gonflent les voiles de la liberté de peindre et de voguer à l’infini malgré ceux qui restent à terre et crient à la dérive, ceux qui n’aiment que le gris ou le marron . Le monde de Landemaine est rose ou jaune ou vert mais bien plus noir qu’il n’y paraît, vous y trouverez les labyrinthes d’Icare jamais les promenades d’Homais, rien de facile . Même si Icare est tombé, il s’est élevé, même si Sisyphe s’est éreinté, il n’a jamais renoncé . Il a pris les pinceaux .
Comme Baudelaire assommait les pauvres pour leur rendre leur dignité, Landemaine nous opère de la cataracte de la vie au jour le jour pour renvoyer chacun de nous à sa sensibilité, sa liberté, sa différence, à chacun d’en définir la couleur .

Guillaume Landemaine, Autoportrait